Quand le décès d’un proche survient, c’est toute une relation qui prend fin. Cela bouleverse les repères et le temps qui suit s’avère être un long chemin bordé de tristesse profonde, de questionnements, de douleur et de bien d’autres sentiments encore.
Le décès d’un proche par suicide
Le décès par suicide d’un proche provoque un profond sentiment d’effroi, un choc de nature traumatique.
Il survient la plupart du temps comme une véritable tragédie et clôt de façon abrupte la relation avec “ceux qui restent”, laissant place à une sensation de déchirure, d’arrachement. Une première réaction consistera d’ailleurs souvent en un déni de la nouvelle annoncée - “Non, ce n’est pas possible, je lui ai encore parlé ce matin...” - en préférant évoquer un accident, une erreur de personne.
À la douleur de la perte se conjuguent alors des sentiments extrêmes, le harcèlement de questions restant sans réponses ainsi qu’un cortège de bouleversements affectant le quotidien tant dans ses aspects familiaux que sociaux, professionnels, financiers, etc.
Face à un tel bouleversement, l’entourage se sent souvent démuni et peut se retrouver bien malgré lui dans une position de retrait.
De ce fait, les personnes endeuillées par suicide font fréquemment l’expérience de la solitude dans la traversée éprouvante de ce temps chaotique de leur existence.
Le processus du deuil après suicide, de l’avis unanime aussi bien des personnes directement concernées que de celles qui les accompagnent, constitue donc une épreuve particulièrement difficile à vivre.
Comment se passe le processus du deuil ?
Lorsque la réalité du suicide du proche aura été admise, le processus du deuil s’initiera avec des sentiments intenses de tristesse, de honte, de culpabilité et de colère.
Tandis que d’incessantes questions et pensées - “Pourquoi ?”, “Qu’aurais-je dû faire ?”, “Que n’ai-je pas vu ? ”, “Si j’avais su... ” - leur tortureront l’esprit, les personnes endeuillées seront amenées à repasser sans fin le film des derniers temps de leur relation avec l’espoir inconscient de transformer la réalité en accomplissant “le bon geste”, en prononçant “les bonnes paroles qui sauveront l’autre de la mort”.
La vie de l’autre sous sa responsabilité
Tout au long de ce processus, les personnes endeuillées par suicide peuvent être tourmentées par des questions autour de leur responsabilité quant à la mort de l’autre.
Environ 6 mois après le drame, alors que l’on pourrait s’attendre à un début d’amélioration, les personnes endeuillées traversent bien souvent la période la plus sombre. Elles se sentent fréquemment en décalage avec leur environnement relationnel dont les conseils - “Il faut tourner la page, la vie continue...” - s’avèrent souvent inaudibles. Ces propos renforcent leur sentiment de solitude et d’incompréhension et laissent amis et collègues dans un sentiment d’impuissance à les réconforter.
Ainsi, certains reconnaissent en effet qu’ils “sont à prendre avec des pincettes”. Lorsqu’on leur demande : “Ça va ?”, ils s’exclament : “Comment peut-on me demander ça, comme si ça pouvait aller !” ... et si, en revanche, on ne leur demande rien : “Vous vous rendez compte, personne ne s’intéresse à comment je vais !”.
L’exacerbation des sentiments, l’aspect persécuteur des pensées et les divergences de réactions dans les familles et les couples amènent souvent les relations à se distendre et, parfois, à se rompre. Des enfants peuvent perdre leur statut d’enfant pour prendre en charge un des parents devenu incapable d’assumer son rôle, des conflits latents peuvent exploser... À l’inverse, dans certains cas, les liens sont amenés à se resserrer et à se renforcer.
Les personnes endeuillées après un suicide chercheront à comprendre jusqu’au moment où elles pourront admettre que la vie de l’autre, ses souffrances, ses raisons de vivre ou de ne plus vivre, n’étaient pas sous leur contrôle, qu’elles n’avaient accès qu’à la pointe de l’iceberg et non à sa part immergée qui, elle, demeurera un mystère.
La vie de l’'après' est à réorganiser. Pour chacun, cela sera différent, même si l’on constate plusieurs types de “mouvements” : les personnes qui se replient vers l’intérieur et celles qui s’ouvrent davantage au monde, celles qui s’inscrivent dans une association ou la créent, celles qui changent, déménagent et entreprennent une vie “ailleurs”, etc.
Le deuil chez l’enfant et l’adolescent
Lorsqu’un enfant ou un adolescent est confronté au suicide d’un parent ou d’un proche, il est traversé par diverses émotions. Elles sont variables selon son âge, sa personnalité et son histoire familiale. Son corps et ses comportements peuvent également en être affectés.
En effet, des maux de tête, de ventre, des troubles du sommeil et de l’appétit peuvent survenir. Le deuil des enfants est influencé par la façon dont la famille le vit. Les enfants ont besoin du regard et des mots des adultes pour donner du sens à ce qu’ils vivent. Souvent, ils expriment leur douleur de façon non verbale.
L’enfant, l’adolescent, se retrouvera confronté à de nombreuses questions telles que : “Qu’est-il arrivé ?”, “Comment ça s’est passé ?”, “C’est quoi la mort ?”, “Pourquoi a-t-il/elle fait cela ?”, “Est-ce de ma faute ?”, “Et maintenant ?”,... Les réponses qu’il tentera d’y apporter témoignent du besoin de se positionner face au geste suicidaire.
Il est important de dire aux enfants que la personne est morte, qu’elle s’est suicidée. Il est également important de répondre à leurs questions tout en restant attentif à utiliser des mots simples et à leur niveau et de ne pas les encombrer avec des descriptions trop précises. Rappelons, par ailleurs, qu’en offrant à l’enfant la possibilité́ de rencontrer d’autres enfants endeuillés, on l’aidera dans son processus de deuil.
Nous partageons ce témoignage d'un parent endeuillé par suicide. Il souligne l'importance de la prévention du suicide, particulièrement auprès des jeunes. Des ressources existent. N'hésitez pas à consulter les informations sur notre site.